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Quelle vocation de baptisé III ?

Avant de reprendre notre réflexion sur le baptême, arrêtons-nous sur une notion qui semble bien mal comprise en régime chrétien: celle de la liberté.

Hans KÜNG, dans son livre « L’Eglise » répond à cette question : « Qui donc est libre ? » dans l’Eglise primitive

Est libre celui qui est libre à l’égard du péché, qui ne veut pas vivre de soi, par soi et pour soi, mais de Dieu et, de cette manière justement, pour ses frères humains.

Dieu lui-même doit rendre libre l’homme non libre, et incapable de liberté, le libérer pour la liberté.

En Jésus-Christ, le nouvel homme libre, Dieu a promis, ouvert et donné à tous les hommes accès à la liberté nouvelle et véritable.

A l’homme pécheur qui pense trouver sa liberté, parce qu’il peut disposer de soi de façon autonome, il est dit qu’il n’acquiert la liberté qu’en laissant quelqu’un disposer de lui, Dieu qui l’adopte comme son enfant.

Après comme avant, l’homme peut pécher ; mais il n’y est plus contraint. Le péché n’a plus de force contraignante sur lui.

La liberté du chrétien est une liberté, une disponibilité pour servir Dieu et les autres.

En unissant paradoxalement indépendance et obligation, puissance et renoncement, autonomie et service, domination et servitude, la liberté du chrétien est une énigme pour le monde. Mais, pour le chrétien, cette énigme est résolue par ce qui fait le noyau de cette liberté : l’amour, la charité par laquelle la foi devient opérante.

Quelle bouffée d’air que d’entendre ces propos sur le péché et sur l’appel au discernement de la volonté de Dieu : ce qui est bon, ce qui lui plaît, ce qui est parfait (Rm 12,2)

C’est la propre conscience de chacun qui est apte à distinguer le bien du mal, conscience éclairée par l’amour de Dieu !

En Christ, homme nouveau et vie nouvelle ! N’oublions pas de manifester au monde que nous sommes un peuple de sauvés.

Adrien CANDIARD relit pour nous la Lettre à Philémon. Philémon est un ami de Paul qui lui écrit à propos de la liberté de son esclave venu chercher protection auprès de Paul.

(Paul) a découvert que la sainteté n’est pas l’accomplissement de telle ou telle consigne impérative, ni l’ascension héroïque et épuisante vers des sommets de perfection qui le défient, mais l’alliance, l’amitié avec le Christ, la vie avec Dieu…

Paul va faire le bien, non parce qu’il craint le gendarme divin ou cherche à mériter son amour conditionnel, mais parce qu’il déborde de cet amour qu’il vient de recevoir en plein cœur.

Cette morale aura ses exigences (et bien plus que la précédente), parce qu’elle ne demande pas de lui telle ou telle action, mais le don de tout son être.

La vie chrétienne, c’est grandir en liberté, pas faire ce qu’on te dit, à chacun, son propre choix du bien. Paul ne peut pas forcer une conscience, même celle de son ami.

Dans la Lettre aux Galates, Paul se met en colère quand pointe la tentation, chez des chrétiens , de vivre la relation à Dieu dans une forme de servitude.

Dieu, le Père par excellence, préfère prévenir que punir.

Il y a des choix de vie qui sont des impasses, qui sont mortifères ; la Parole de Dieu  est là présente pour nous en protéger et conduire à la Vie.

Ne soyez pas étonnés de ces propos choisis. Il nous paraissait important de resituer le « oui » du baptême dans le don permanent, inconditionnel de l’amour du Père.

Promis, le prochain texte sur la notion de prêtre arrive très vite !

Bien fraternellement.

Blandine, Evelyne et Laurence

Quelle vocation de baptisé II ?

Un grand merci à ceux qui ont participé à l’échange ! Nous espérons apporter des éléments à la réflexion.

Sans votre accord, nous ne pouvons pas présenter vos réactions à tous les lecteurs.

Vocation de l’homme, vision chrétienne de l’homme ?

Reprenons le psaume 8 et savourons ce qui nous est offert. «  Qu’est donc l’homme pour que Tu penses à lui, l’être humain pour que tu t’en soucies ? Tu en as presque fait un dieu, tu le couronnes de gloire et d’éclat ; tu le fais régner sur les œuvres de tes mains ; tu as tout mis à ses pieds. »

A partir de l’Écriture, le concile va affirmer la vocation divine de l’homme : la fin de l’homme est Dieu », sa dignité et que la liberté de chacun consiste à y adhérer.

C’est ce que dit la foi chrétienne de tout homme, chrétien ou non ; cette foi affirme le sens et le but de la vie présente de tout homme.

Tout vient de Dieu et tout revient à Lui.

Si nous retournons vers le livre de la Genèse et ses récits de création, il apparaît très clairement le rôle de « partenariat » que Dieu attribue à l’homme : cet homme, cette humanité sont au sommet de la création: Dieu vit que cela était très bon (Gn1, 31).

Dieu s’adresse à l’homme, il lui parle manifestant que ce dernier est un être de langage, un être social, qui, sans relations avec autrui, ne peut vivre, ni épanouir ses qualités.(Gaudium et spes, 12,4)

Dieu lui confie sa création parce qu’il l’a créé capax Dei (capable de Dieu), intelligent, libre, capable d’aimer et participant à la Création.

Répétons-le la création est bonne et l’homme est créé bon, de la bonté même de Dieu qui se donne à lui, qui lui est communiquée.

Pour nous éclairer, permettez-nous de vous livrer un texte sur l’image et la ressemblance de Dieu de Brigitte CHOLVY, citée plus bas :

« L’écart entre image et ressemblance permet d’entendre la justesse de la notion de vocation : si l’image est toujours déjà donnée, est indélébile et se manifeste dans l’appel incessant inscrit dans le cœur, la ressemblance est à faire et à recevoir, et encore à venir entre l’union des hommes entre eux et la communion avec Dieu ».

Dans Gaudium et spes (GS), le terme de ressemblance n’est employé qu’en deux circonstances :

22-2 Image du Dieu invisible (Col 1,15), il(le Christ) est l’Homme parfait qui a restauré dans la descendance d’Adam la ressemblance divine, altérée dès le premier péché.

24-3 quand le Seigneur Jésus prie le Père pour que « tous soient un…, comme nous sommes un » (Jn 17,21-22), il ouvre des perspectives inaccessibles à la raison et il nous suggère qu’il y a une certaine ressemblance entre l’union des personnes divines et celle des Fils de Dieu dans la vérité et dans l’amour. Cette ressemblance montre bien que l’homme, seule créature sur terre que Dieu a voulue pour elle-même, ne peut pleinement se trouver que par le don désintéressé de lui-même.

« La vocation de tout homme est d’exister en reconnaissant Dieu comme son Créateur et à se reconnaître en lien de dépendance radicale, à reconnaître ce lien fait d’appel, de dialogue et de communion avec Dieu Créateur ».1

Ce qui vient à l’esprit quand nous parlons de la bonté, c’est l’amour gratuit, inconditionnel et parfait comme l’être même de Dieu, la sainteté de Dieu trois fois saint, que nous fait acclamer la liturgie.

Dieu donne, à l’homme de le voir, de le discerner chaque jour dans sa propre vie, et d’accepter, dans la liberté dont Dieu l’a doté, d’en vivre !

Revenons maintenant à Lumen Gentium pour souligner un aspect novateur voulu par les Pères conciliaires, c’est l’aspect universel : l’appel universel à la sainteté et l’accès de tous à la Parole de Dieu.

 LG V, 39   Dans l’Église, tous sont appelés à la sainteté selon la parole de l’apôtre : « Oui, ce que Dieu veut c’est votre sanctification » (1Th 4,3).

Voilà ce que Dieu veut pour chacun d’entre nous.

LG 40 L’appel à la plénitude de la vie chrétienne, et à la perfection de la charité s’adresse à tous ceux qui croient au Christ, quels que soient leur état, ou leur rang ; dans la société terrestre elle-même, cette sainteté contribue à promouvoir plus d’humanité dans les conditions d’existence.

-Il y a une étape fondamentale qui est réponse particulière au sein d’une communauté à cet appel à la sainteté, c’est le baptême.

Nous sommes un peuple de saints, promesse de Dieu à Moïse (Exode 19,6 : vous serez pour moi un royaume de prêtres et une nation sainte), et selon la

proclamation de saint Paul (Éphésiens 1,4 : Il nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints et irréprochables sous son regard, dans l’amour.)

Saint Paul s’adresse aux chrétiens en les appelant saints et fidèles en Jésus Christ, saints de Colosses, l’Église de Dieu qui est à Corinthe ainsi qu’à tous les saints qui se trouvent dans l’Achaïe entière…

Il y a eu une volonté du concile d’ouvrir les Écritures à tous les chrétiens. Cette attention-là est présentée dans la constitution Dei Verbum, La Révélation divine.

DV 25 « En effet, l’ignorance des Écritures, c’est l’ignorance du Christ. » (St Jérôme)

« Qu’ils abordent le texte sacré lui-même, soit par la sainte liturgie imprégnée des paroles de Dieu, soit par une pieuse lecture, soit par des cours appropriés et par d’autres moyens qui, avec l’approbation et par les soins des pasteurs de l’Église, se répandent partout de nos jours d’une manière digne d’éloges. Qu’ils se rappellent aussi que la prière doit aller de pair avec la lecture de la Sainte Écriture, pour que s’établisse le dialogue entre Dieu et l’homme, car “nous lui parlons quand nous prions, mais nous l’écoutons quand nous lisons les oracles divins ». (St Ambroise) ».

Nous sommes nombreux à vivre joyeusement ce compagnonnage avec la Parole qui nous nourrit et nous invite à la partager, la commenter, la comprendre toujours de nouveau !

En tant que laïcs, nous ne pouvons que rendre grâce à l’Esprit qui a inspiré aux Pères conciliaires cette ouverture à l’intelligence des Écritures.

– Il est à souligner que les non-chrétiens n’ont pas été oubliés.

Dans la partie « Le Peuple de Dieu » de Lumen Gentium, le paragraphe 16 est consacré aux non-chrétiens, eux aussi ordonnés au Peuple de Dieu. Il s’agit des Juifs, des musulmans et tous ceux qui sont honnêtes dans leur recherche de Dieu. L’appel à la sainteté étant universel, on pourrait dire aussi que la volonté de Dieu du salut est pour tous, ceux qui cherchent Dieu d’un cœur sincère et s’efforcent, sous l’influence de sa grâce, d’agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte, ceux-là peuvent arriver au salut éternel. Tout ce qui, chez eux, peut se trouver de bon et de vrai, l’Église le considère comme une préparation évangélique et comme un don de Celui qui illumine tout homme pour que, finalement, il ait la vie.

Cela répondra peut-être en partie au questionnement de certains d’entre vous, même si la révélation de la volonté et de l’action divine est délicate à affirmer dans notre société démocratique, moderne qui tend à circonscrire la reconnaissance de Dieu à l’intimité de chacun et à exclure l’idée même de Dieu du champ des possibles.

Mais n’est-ce pas un beau challenge à relever que d’annoncer le règne de Dieu à tout homme, chrétien ou non, dans le service humble, l’amour fraternel et l’espérance joyeuse ?

Ne touchons-nous pas là un peu du sens de notre baptême ?

Pour progresser sur notre parcours, nous pourrions nous poser cette question :

Que verriez-vous comme lien entre vocation de l’homme et vocation du baptisé ?

1 Des théologiens lisent le concile Vatican II, Brigitte CHOLVY, Quel renouveau dans la continuité pour la vision de l’homme, p. 31

Il nous reste à vous souhaiter une belle et bonne fête de Noël !

Blandine, Evelyne et Laurence

Quelle vocation de baptisé ?

Nous aimerions pouvoir échanger, ce n’est cependant pas une obligation.

Une question est posée à la fin du texte ci-dessous : elle permet à chacun de s’exprimer s’il le souhaite et de renvoyer  la réponse. Je collecterai les réponses et vous en enverrai la synthèse.

Pour commencer, je reprends des mots qui sont venus dans votre réflexion :

Concernant le mot « baptisé » :

  • acte de foi
  • se reconnaître enfant de Dieu
  • faire partie du Corps du Christ, même si l’expression gêne un peu
  • entrer dans la grande famille de l’Église
  • invités à vivre dans l’esprit de Jésus Christ
  • désir, attente du catéchumène en attendant la confirmation de l’appartenance à la Vérité

Concernant le mot « vocation » :

  • appel, être appelé
  • et répondre à la volonté du Père (les trois demandes du Notre Père à Dieu Père : sur la terre comme au ciel, que ton nom soit sanctifié, que ton règne vienne, que ta volonté soit faite)
  • et être signe de l’amour auprès de l’entourage
  • engagements, aptitudes
  • se consacrer au service de Dieu

Pour expliquer l’origine de la proposition faite, cela est apparu comme une évidence

de questionner notre vocation baptismale, après 2-3 années de réflexion sur la messe et la privation des célébrations communautaires physiques  de la Semaine Sainte, de la Vigile  où 5 catéchumènes de notre paroisse auraient dû recevoir les sacrements de l’initiation chrétienne et enfin de ne pouvoir vivre  Pâques ensemble.

Dans notre aventure de chrétien, tout commence par le baptême, cette entrée manifestée dans cette nouvelle vie inaugurée par le Christ. Si nous éprouvons une grande joie à la pensée que des enfants, des jeunes, des adultes sont baptisés, il est important de visiter les fondements de cette joie qui nous est offerte, à nous « vieux » baptisés ou plus jeunes.

Nous nous appuierons sur des textes divers :

  • Lumen Gentium, constitution dogmatique sur l’Eglise et guide de lecture
  • Des théologiens lisent le concile Vatican II : Pour qui ? Pour quoi ? (Theologicum)
  • Tous, prêtres, prophètes et rois, Elmer MITTERSSTIELER, 2018
  • L’Eglise, des femmes avec des hommes, Anne-Marie PELLETIER, 2019
  • Revue Eglise et Vocation, n°10 La vocation baptismale
  • Rituel de l’Initiation chrétienne des adultes, rituel du baptême des petits enfants

Nous allons structurer notre démarche en partant de deux bases solides, l’Écriture et « Lumen Gentium (Lumière des nations) », la constitution dogmatique sur l’Église,  une des quatre constitutions du concile Vatican II promulguée le 21 novembre 1964.

L’Écriture est constamment convoquée dans Lumen Gentium, LG, dans une invitation à la relecture et à la mise en valeur de textes qui vont nous révéler le dessein de Dieu pour nous les hommes et les femmes d’aujourd’hui, les nations.

Quelle perspective théologique les Pères conciliaires ont-ils adoptée ?

Citons H. de Lubac dans ses Carnets du Concile :

On peut dire [ …] qu’il y a deux sortes de théologiens ;                                       les uns disent : relisons l’Écriture, Saint Paul, etc. ; scrutons la Tradition ; écoutons les grands théologiens classiques ; n’oublions pas de faire attention aux Grecs ; ne négligeons pas l’histoire ; situons dans ce vaste contexte et comprenons d’après lui les textes ecclésiastiques ; ne manquons pas non plus de nous informer des problèmes, des besoins, des difficultés d’aujourd’hui, etc.      

Les autres disent : relisons tous les textes ecclésiastiques de ces cent dernières années, encycliques, lettres, discours de circonstance, décisions prises contre tel ou tel, monita du Saint-Office, etc. ; de tout cela, sans en rien laisser perdre ni en corriger le moindre mot, faisons une marqueterie, poussons un peu plus loin la pensée, donnons à chaque assertion une valeur plus forte ; surtout ne regardons rien au-dehors ; ne nous perdons pas dans de nouvelles recherches sur l’Écriture ou la Tradition, ni a fortiori sur des pensées récentes, qui nous feraient risquer de relativiser notre absolu.                         Seul le théologien de la seconde espèce est considéré comme « sûr » dans un certain milieu.

Pourtant c’est la première manière de faire de la théologie qui l’a largement emporté au concile Vatican II et qui a été choisie par les Pères. On assiste à la validation d’une théologie qui plonge à la source biblique et à la grande Tradition, qui ne cesse de s’interroger sur son rapport à l’expérience, qui entre en dialogue avec d’autres champs de la culture, qui rend compte de ses règles d’interprétation et n’oublie pas ses effets sur l’Église et la société. (Des théologiens.., p. 12-13)

Nous voyons là combien le concile a ouvert les portes, le vent du renouveau dans la continuité a soufflé. Si nous nous reconnaissons enfants du concile, celui-là nous autorise, nous oblige même à redécouvrir et à vivre des richesses données et reçues lors de notre baptême. Nous entrons ainsi dans un dialogue, une relation intime avec Dieu.

Le concile parle de Dieu bien évidemment mais il parle de l’homme aussi. Relisant le psaume 8, 5-7 (TOB) : qu’est donc l’homme pour que Tu penses à lui, l’être humain pour que tu t’en soucies ? Tu en as presque fait un dieu, tu le couronnes de gloire et d’éclat ; tu le fais régner sur les œuvres de tes mains ; tu as tout mis à ses pieds. Avant même de parler d’une vocation de baptisé, il y a une volonté par le concile d’affirmer la vocation de l’homme, de l’être humain, de présenter la vision chrétienne de l’homme.   Comment les définiriez-vous ?

Blandine, Evelyne et Laurence du groupe “Mieux vivre la messe”