Il fallait que le Fils de l’homme souffre beaucoup

« Je n’oublie pas que le mot « curé » vient de l’expression latine « cura animarum », et signifie « prendre soin des âmes »

Lectures du jour : 

XXIV Dimanche – Mc 8,27-35

L’Evangile de ce dimanche met essentiellement en scène deux personnages: Pierre et Jésus. L’un interroge; l’autre cherche à répondre. L’un donne son consentement au chemin de la Passion; l’autre se révolte quand il entrevoit ce chemin. Deux figures contrastées, mais dont la confiance mutuelle et le dialogue – permettent aussi bien une belle confession de la foi que les vifs reproches.

Mes frères et sœurs, c’est grâce à ce dialogue, grâce à cette relation authentique sans faux-semblants de la part de Pierre, que Jésus formera en lui la capacité de vouloir ce que Dieu veut. En effet, en disant à Pierre « passe derrière moi, Satan » – Jésus précise: car « tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes ».

Mais comment savoir que telles pensées viennent de Dieu et d’autres des hommes ?

Pour répondre à cette question, regardons en quoi consistent les pensées des hommes développées par Pierre ! Elles consistent en un rejet violent de toute idée de souffrance. Souffrir, être rejeté et mourir, ce serait, aux yeux de Pierre, un échec pour Jésus.

Cependant la réaction de Pierre à l’annonce de la Passion me semble tout à fait normale: Pierre aime Jésus; il ne veut pas permettre que son ami soit livré à la malice et à la méchanceté humaine. Il faut espérer que nous aurions eu la même réaction; elle est le premier test de l’amour, et ce n’est qu’ensuite qu’il est possible d’aller plus loin! Et justement, Jésus va plus loin, et même très loin face à la réaction de Pierre pour l’enseigner les chemins de Dieu. Il n’a pas peur de le corriger et de l’éduquer. C’est pour cette raison que Pierre entendra Jésus lui dire: « Passe derrière moi, Satan » ! Ne prétend pas de me dicter le chemin! Accepte de marcher derrière! C’est là, ta place!

« Marcher derrière », mes frères et sœurs, c’est l’attitude normale du disciple. Voilà pourquoi appelant la foule, Jésus leur dit: « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix, et qu’il me suive ».

Il m’est arrivé quelques fois de méditer ces paroles de Jésus sur la route; derrière le volant. J’avais devant moi une voiture. Elle roulait normalement. Je n’avais qu’à la suivre. Mais cela n’était pas facile; cela n’allait pas de soi. L’autre me gênait. Il m’empêchait de bien voir. J’ai trouvé qu’il n’avance pas assez vite. Je m’interrogeais et critiquais: « Pourquoi freine-t-il? Pourquoi fait-t-il ceci, pourquoi fait-t-il cela? Il avait ses raisons que je ne connaissais pas. C’est seulement après que je comprenais! Je faisais alors les mêmes mouvements; à mon tour j’ai freiné, j’appuyais à gauche ou à droite.

Je voudrais dire par cet exemple que marcher derrière Jésus, c’est accepter de ne pas tout voir, tout savoir, tout contrôler, tout comprendre. C’est de Lui faire confiance, c’est-à-dire croire ! « Crois et tu comprendras » – aimait dire Saint Augustin. Et il précisait: « Il faut croire pour pouvoir connaître: celui qui veut connaître avant de croire, ne réussit ni à connaître ni à croire ».

Et encore une petite chose. Lorsque nous sommes confrontés à des situations de souffrance: souffrance personnelle ou souffrance de ceux et celles qui nous sont chers, la première réaction est généralement la révolte.

Et pourtant, aussi compréhensibles et émotionnelles que soient ces réactions, elles ne nous aident pas à faire face aux épreuves de la vie. La souffrance est là, et elle demande à être traversée. Oui, paradoxalement, nous nous trouvons devant une chance de grandir humainement et spirituellement. Voilà pourquoi Jésus parle de sa souffrance ouvertement – précise évangéliste Marc. En effet, dans la souffrance, on ne peut pas se cacher: c’est là qu’on est vu et qu’on se voit tel qu’on est vraiment.

Je termine. C’est bien « en chemin » que Jésus interroge ses disciples. Tous les évangélistes notent ce détail: « Chemin faisant, il les interrogeait ».

C’est un détail très important chers frères et sœurs, car c’est toujours au cours de la marche que les questions vraies se posent. Il faut être « chemin faisant »; en nous-mêmes aimer le mouvement, la souplesse de l’intelligence et du cœur pour entendre les questions qui comptent. C’est « en chemin », c’est-à-dire à tout âge et dans toutes les circonstances de notre vie, y compris ce dimanche, que nous avons à répondre à la question qui est Jésus pour moi?

Père Stanislas Stawicki

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