Transfiguration du Seigneur – Mt 17, 1-9
Quand le pape Jean Paul II a ajouté il y a 20 ans (en 2002) sur la liste des mystères du Rosaire « les mystères lumineux », la Transfiguration que nous célébrons en ce dimanche, y a trouvé une place d’honneur. Oui, la Transfiguration du Seigneur est un mystère lumineux. Mais, en quoi précisément ce mystère veut illuminer notre vie chrétienne quotidienne?
Je voudrais m’arrêter brièvement avec vous sur une de ces multiples lumières qui se dégagent de l’épisode de la Transfiguration, à savoir la réaction de Pierre: « Seigneur, il est bon que nous soyons ici ! Si tu le veux, je vais dresser ici trois tentes: une pour toi, une pour Moïse, et une pour Elie ».
Eh bien, l’apôtre Pierre est souvent critiqué à l’occasion de cette fête. On trouve son intervention maladroite. En commençant par l’évangéliste Luc qui – en racontant le même épisode de la Transfiguration – reproche à Pierre (je le cite) de « ne pas savoir ce qu’il dit ». Ainsi, on traite Pierre d’être ridicule, impulsif et naïf.
C’est vrai! Les récits évangéliques nous montrent que Pierre ne trouve pas toujours les mots qu’il faut, mais c’est un homme droit et sincère. Il parle, il questionne, il réagit du fond de son cœur!
Je pense, chers frères et sœurs, que nous touchons ici une des plus grandes qualités de Pierre : la capacité de dire ce qui l’habite; la liberté de parler de ses sentiments; la capacité de libérer la parole sans craindre de se faire corriger ou d’être tourné en ridicule.
Voilà une des lumières que nous pouvons dégager du mystère de la Transfiguration. Je la repère, car celui qui cache ses vrais sentiments : ses émerveillements ou ses déceptions – aussi bien au sein de nos familles ou au sein de nos communautés – s’enfonce tout droit soit dans l’angoisse, soit dans l’agressivité, soit dans le paraître.
Ainsi, l’apôtre Pierre nous suggère de libérer la franchisse par rapport à ce qui nous habite; par rapport à ce qui nous arrive. En effet, Pierre avait cette bonne habitude de tout dire à son Maître. Par contre, son collègue – Judas Iscariote – ne parlait presque jamais. Une seule fois qu’il prend la parole dans les évangiles, c’était pour mentir – nous dit l’Évangéliste Jean. Il avait certainement ses doutes, ses angoisses, ses questions, mais il préférait ne pas en parler; il préférait faire-semblant.
Prions pour que cette petite lumière qui nous vient de l’épisode évangélique de la Transfiguration nous aide à devenir des femmes et des hommes toujours plus droits, simples et sincères.
Et encore une petite chose.
Vous avez certainement appris que la cathédrale orthodoxe d’Odessa, consacré justement à la Transfiguration du Seigneur, un édifice très beau et majestueux que j’ai eu l’occasion de visiter en 2009, a été partiellement détruite dans la nuit du samedi 22 au dimanche 23 juillet. Elle a été défigurée et le peuple ukrainien e été atteint à l’âme.
Cependant les Ukrainiens ne démissionnent pas car dans le monde orthodoxe, qu’il soit grec ou slave, la Transfiguration est plus qu’un moment de la vie de Jésus fêté par la liturgie. Elle est comme le passage à la vie spirituelle adulte puisqu’il s’agit de percevoir la beauté et la présence de Dieu sous l’apparence ordinaire de la vie des hommes, y compris par-delà le voile de la souffrance, de la maladie ou de la guerre. Oui, la Transfiguration nous dit que sous la cendre de la destruction, il y a un avenir possible !
Chers frères et sœurs, cette invitation à la « transfiguration », nous est adressé à nous aussi. Après les mois de pandémie que nous avons traversés ensemble, nous savons bien qu’il est plus facile de retirer un masque de papier, que de laisser tomber ce masque invisible dont nous nous revêtons si souvent, et qui nous empêche de laisser voir notre beauté.
Voilà pourquoi, encouragés par les JMjistes, comme on les appelle, qui clôturent en ce moment-même leur rassemblement à Lisbonne, et qui n’ont pas honte de témoigner ouvertement de leur appartenance au Christ, laissons-nous conduire aujourd’hui sur le mont Thabor pour nous laisser transfigurer par la beauté du Christ, malgré tout ce qui peut encore assombrir nos vies. Et prions les uns pour les autres afin que la beauté d’être chrétien que chacun porte en lui, se laisse déconfiner et rayonne sans que rien ne puisse nous empêcher d’écouter et de témoigner de Jésus dans l’ordinaire de nos vies. Amen.
Père Stanislas