Lettre pastorale de Mgr Laurent Ulrich : “Cette année 2024 dans le diocèse de Paris”

Lettre pastorale de Mgr Laurent Ulrich : “Cette année 2024 dans le diocèse de Paris”

En la fête de la Présentation de Jésus au Temple, Mgr Laurent Ulrich, archevêque de Paris, a adressé une lettre pastorale à tous les Parisiens.

À dix mois de la réouverture de la cathédrale, il trace les grandes lignes de l’année pour que tous se préparent dans la joie à vivre pleinement ce retour à Notre-Dame de Paris.

 

Le 16 décembre dernier, lors de la bénédiction du coq de Notre-Dame, dans la lumière de la fin du jour, au milieu d’une assemblée intriguée au chevet de la cathédrale, Paris était belle. Des groupes s’étaient formés dans les rues et attendaient de voir le coq monter dans les airs, les mouettes tournoyaient autour de ce nouveau compagnon qui les rejoignait ; et soudain, quand il a commencé de descendre sur la hampe qui l’attendait, tout en haut de la flèche, ce fut une clameur d’en bas et le chant des mouettes qui disaient ensemble leur joie ! Nous étions alors à moins d’un an de la réouverture de Notre-Dame, annoncée pour le 8 décembre prochain.

Six mois de fête et de louange pour la réouverture de Notre-Dame

Et maintenant, nous sommes à dix mois de cette échéance, je vous propose de regarder ensemble ce qui nous attend.

Le déroulement du chantier lui-même ne nous appartient pas… mais, pour le moment, le calendrier est tenu, et les équipes travaillent avec bonheur, entrain et entente ; cette atmosphère est un bel exemple qui peut inspirer bien des collaborations dans nos vies familiales, sociales, professionnelles. Les échafaudages intérieurs disparaissent, le volume de la cathédrale apparaît… plus grand ! Le sol est encore ouvert par endroits, pour les fouilles archéologiques et pour la création de conduits assez larges pour l’électricité, le chauffage, les circuits de protection et d’alerte incendie. Pendant que les travaux s’achèveront, nous commencerons à mettre en place nos installations et organisations à partir de la fin de l’été : deux à trois mois ne seront pas de trop.

J’aimerais vous présenter maintenant le calendrier de la réouverture, tel que je commence à le prévoir aujourd’hui.

Une quinzaine de jours avant cette réouverture, nous accompagnerons le retour de la statue de Notre Dame qui est aujourd’hui à St-Germain-l’Auxerrois, avec une grande procession populaire dans les rues à laquelle je veux dès maintenant vous inviter !

La réouverture en tant que telle débutera par un triduum comprenant l’inauguration officielle, le 7 décembre : la remise de Notre-Dame par l’État propriétaire à l’affectataire qui est l’Église catholique ; l’éveil de l’orgue, célébration liturgique avec bénédiction, un Magnificat ou un Te Deum, puis les vêpres. La consécration de l’autel se fera au cours de la première messe dans la cathédrale restaurée, le dimanche 8 décembre. Enfin, nous aurons la joie de fêter l’Immaculée conception, que la liturgie célèbre, cette année, le 9 décembre, en raison du 2e dimanche de l’Avent.

Cette fête de la réouverture de Notre-Dame mérite bien une octave : du 8 au 15 décembre, chaque jour, nous aurons une célébration solennelle avec une thématique particulière.

Jusqu’au 8 juin 2025, fête de la Pentecôte, ce sera le temps de la réouverture de Notre-Dame de Paris. Nombreux seront ainsi ceux qui pourront dire : « J’étais à la réouverture ! » Il faut en effet compter que le nombre de places dans la cathédrale n’est pas très important : Notre-Dame n’est assurément pas la plus grande église de Paris !

Bien sûr, en ces jours, il y aura de la place pour les personnalités publiques, l’État propriétaire, les donateurs, les équipes qui ont travaillé avec tellement de joie depuis cinq ans, les pompiers sauveteurs de l’édifice le 15 avril 2019, les évêques français, des évêques étrangers, des représentants des diocèses français… Mais surtout je veux que le peuple de Paris soit présent à ces célébrations de la réouverture. Je n’oublierai jamais cette chronique journalistique de Madeleine Delbrêl, humble assistante sociale de quartier « éblouie par Dieu », que le diocèse de Créteil chérit particulièrement, instruisant sa cause de béatification. C’était à l’occasion de l’enterrement du cardinal Emmanuel Suhard, en 1949. Ce jour-là, il pleuvait, la cathédrale était réservée au clergé et aux personnalités officielles, et le peuple était sur le parvis, « le peuple qui croyait et aussi le peuple qui ne croyait pas » [1] : le peuple de Paris pleurait son archevêque mais ne pouvait pas entrer dans sa cathédrale !

Pendant ces six mois, je recommande particulièrement que soient organisés des pèlerinages des paroisses de Paris, et des diocèses de la province de Paris. Nous préparons une proposition de pèlerinage à vivre dans la cathédrale comprenant une messe, avec lectures propres, oraisons et préfaces adaptées à la circonstance, à la disposition des groupes de pèlerinages. Je sais par ailleurs que des diocèses seront heureux de recevoir une statue de Notre-Dame de Paris pour organiser chez eux des temps de prière et de pèlerinage dans leurs propres sanctuaires diocésains.

Mais je voudrais maintenant proposer un état d’esprit pour vivre cette année dans notre diocèse avec justesse.

Lieu-source pour la vie des catholiques de Paris, phare d’espérance pour beaucoup

En premier lieu, Notre-Dame est la cathédrale dont nous avons été privés pendant plus de cinq ans. Elle est d’abord l’Église-mère du diocèse. Vous l’aimez, je l’aime, nous l’aimons. Nous savons qu’elle est le symbole fort de notre Église diocésaine, le lieu où se tient l’évêque – nous n’oublions pas le Martyrium de Montmartre, ni la Montagne Sainte-Geneviève, mais il y a ici la première église sur l’île de la Cité bien protégée et défendue par la Seine qui l’entoure… et la cathédrale voulue par Maurice de Sully en 1163.

Le Concile Vatican II s’exprime ainsi : « C’est pourquoi tous doivent accorder la plus grande estime à la vie liturgique du diocèse autour de l’évêque, surtout dans l’église cathédrale ; ils doivent être persuadés que la principale manifestation de l’Église réside dans la participation plénière et active de tout le saint Peuple de Dieu, aux mêmes célébrations liturgiques, surtout à la même Eucharistie, dans une seule prière, auprès de l’autel unique où préside l’évêque entouré de son presbyterium et de ses ministres. » [2]

Lorsque nous parlons de la cathédrale, nous la considérons comme lieu-source pour notre foi, pour les sacrements dont notre vie chrétienne est nourrie – je reviendrai, plus loin, sur la vie sacramentelle. Elle est le signe de l’implantation de la foi au Dieu-Trinité sur notre terre d’Île-de-France et de son histoire bien enracinée à Paris. Il y a de très nombreuses églises catholiques sur ce territoire parisien, très petit territoire géographique, mais elles se réfèrent toutes à celle-ci. Des milliers de diacres et de prêtres y ont reçu l’ordination, des dizaines de milliers de baptisés y ont été confirmés, et cent-quarante-deux évêques de Paris y ont exercé leur ministère – non pas bien sûr dans ce bâtiment même ! – depuis saint Denys.

Enfin, cette cathédrale est là pour tous. Croyants ou non, chrétiens ou non, elle est un repère pour tous. À nous elle est confiée pour que nous la servions, pour qu’elle demeure un phare dans notre ville. Elle nous procure tant de joie au milieu des circonstances tragiques de notre monde actuel, elle a été le témoin de tant d’événements de la vie de Paris et de notre pays. Nous la redécouvrons telle que nous ne l’avons encore jamais vue, avec une joie qui remplit notre cœur, mais sans arrogance de notre part, sans aucune présomption d’y avoir droit plus que les autres, ou avant les autres. Cette joie qui nous étreint, comment ne la partagerions-nous pas avec tous ceux qui, comme nous, l’aiment ?

Ensuite, au milieu de la liesse à laquelle nous pouvons nous attendre, et aussi de la fierté qui s’attache naturellement à l’œuvre accomplie dans ce délai d’à peine plus de cinq ans, de l’engagement magnifique des entreprises et de leurs employés qui ont trouvé là un accomplissement professionnel exceptionnel, je voudrais que nous sachions simplement dire notre reconnaissance pour une œuvre vraiment commune, nous féliciter de ce sens du bien commun réalisé ensemble qui produit tellement plus de joie que lorsque chacun ne pense qu’à son propre bien. Surtout, je voudrais que nous rendions gloire à Dieu : « Non nobis Domine, non nobis, sed nomini tuo da gloriam » [« Non pas à nous, Seigneur, mais à Ton nom donne la gloire ! » [3] ]. Nous pourrions bien dire et chanter, chacun dans sa prière personnelle et aussi en groupe, en assemblée, ce psaume 95 :

Chantez au Seigneur un chant nouveau,
chantez au Seigneur, terre entière,
chantez au Seigneur et bénissez son nom !
De jour en jour, proclamez son salut,
racontez à tous les peuples sa gloire,
à toutes les nations ses merveilles !
Il est grand, le Seigneur, hautement loué,
redoutable au-dessus de tous les dieux :
néant, tous les dieux des nations !
Lui, le Seigneur, a fait les cieux :
devant lui, splendeur et majesté,
dans son sanctuaire, puissance et beauté.
Rendez au Seigneur, familles des peuples,
rendez au Seigneur la gloire et la puissance,
rendez au Seigneur la gloire de son nom.
Apportez votre offrande, entrez dans ses parvis,
adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté :
tremblez devant lui, terre entière.
Allez dire aux nations : « Le Seigneur est roi ! »
Le monde, inébranlable, tient bon.
Il gouverne les peuples avec droiture.
Joie au ciel ! Exulte la terre !
Les masses de la mer mugissent,
la campagne tout entière est en fête.
Les arbres des forêts dansent de joie
devant la face du Seigneur, car il vient,
car il vient pour juger la terre.
Il jugera le monde avec justice,
et les peuples selon sa vérité !

Je propose aussi et demande même avec insistance que cette fête, cette période de fête le soit pour tout le peuple chrétien, de tous âges et de toutes conditions. Rien de plus beau que de voir, dans les paroisses ou d’autres assemblées chrétiennes, un peuple divers, le peuple des quartiers tels qu’ils sont, avec des enfants, des jeunes, des adultes et des personnes âgées, des personnes bien portantes et des malades, des personnes avec handicap, des étrangers. Rien de plus beau que de voir les associations chrétiennes qui se préoccupent de n’oublier personne, de faire de la place aux plus précaires, aux isolés, aux oubliés : ils seront à Notre-Dame. L’Église que nous souhaitons voir, c’est toute l’Église, présente au milieu de notre société.

Je désire aussi que nous sachions reconnaître la générosité de tous ceux qui ont donné quelque chose pour la reconstruction de la cathédrale. Il y a beaucoup de générosités dans notre monde, plus que nous ne le disons avec un certain pessimisme ; générosité de l’engagement des personnes et de leurs biens en direction des plus précaires, des pauvres, des isolés, des malades. Et aussi beaucoup de générosité pour une œuvre comme celle-ci. Merci aux grands donateurs et mécènes exceptionnels ; merci aux donateurs modestes qui, symboliquement, ont donné quelques euros !

Je pense aussi à tous ceux qui en ce moment renouvellent notre Église : des jeunes qui, dans ce monde difficile, sont à la recherche d’une parole vraie, d’une présence douce et forte, d’engagements qui donnent sens à leur vie, de témoignages qui sonnent juste. Je me rappelle particulièrement ceux que j’ai côtoyés et avec qui j’ai échangé au cours des dernières JMJ au Portugal, l’été dernier. Je pense à ces quelques jeunes reçus par le pape François en ce début d’année : ils sont les ambassadeurs de jeunes des cités, réunis dans une Fraternité née à la suite des émeutes de juin 2023. Ils représentent une immense espérance pour notre société encline à l’indifférence et à la division. Je pense aux adultes catéchumènes ou confirmands : à 22 ou 48 ans, parfois même à plus de 75 ans, les voici sur un chemin où ils cherchent, comme Zachée, à voir Jésus et à l’écouter, à l’accueillir dans leur vie ! Je pense aux six cents séminaristes reçus à Paris début décembre, que des familles ont hébergés pendant trois jours ; nous avons vu leur ferveur, leur profondeur, leur désir de servir et d’aimer. Je pense à ceux qui se proposent de vivre pendant des mois en colocation avec des gens de la rue, avec des jeunes femmes seules en attente d’enfant ou avec enfants déjà, avec des personnes polytraumatisées, cérébrolésées à la suite d’accident… Et combien d’autres qui donnent de leur temps. Et tant de jeunes qui cherchent à connaître mieux l’enseignement chrétien, la doctrine sociale de l’Église.

Tout cela ne se voit pas toujours de loin ou dans les statistiques, mais je suis sûr que c’est le Seigneur qui travaille dans les cœurs. Un vrai renouveau de l’Église ! Qui ne nous donne pas envie de comptabiliser, de nous gonfler d’orgueil et de clamer : voyez ce que nous avons fait ! Mais seulement, et humblement, de rendre gloire à Dieu, parce que c’est Lui qui inspire ce renouveau.

Une année pour grandir dans l’accueil et l’amour de nos frères et sœurs, à la suite du Christ

Avant ces belles journées et ce temps long de la réouverture – je le redis : du 8 décembre 2024 au 8 juin 2025 – et alors que toute l’Église vivra au rythme de l’année jubilaire vécue tous les vingt-cinq ans depuis l’année 1300, plusieurs événements pourront nous faire entrer mieux dans cette action de grâce.

En premier lieu, j’ai déjà annoncé, lors de la Semaine sainte 2023, le projet que le diocèse et les diocésains se laissent instruire ensemble et à nouveau par une catéchèse pour tous sur les sacrements. Je n’ignore pas que la pratique des sacrements a beaucoup diminué depuis plusieurs dizaines d’années, et j’ai la conviction que c’est en grande partie parce que leur signification a échappé à nos contemporains. C’est donc le moment de revenir sur ce qu’ils signifient en profondeur. Il nous faut redécouvrir comment les sacrements sont un don de Dieu pour la mission et pour la vie fraternelle. Ils sont faits pour nous faire entrer dans l’obéissance du Fils de Dieu « dont la mesure est sa mort sur la croix. La seule façon de participer à son offrande est de devenir des “fils dans le Fils”. C’est le don que nous avons reçu. » [4] Ainsi ils ne sont pas des remèdes individuels à une atonie spirituelle, ni un signe d’appartenance à une communauté fermée, mais un don à accueillir pour laisser Dieu agir en nous et révéler son action transformatrice. Le don que nous recevons fait de nous, peu à peu, des frères et des sœurs de JésusChrist et des porteurs de son évangile de don de soi. Dès le Carême 2024 jusqu’à la Pentecôte 2025, un programme nous sera proposé pour développer cette catéchèse pour tous. Ainsi, ayant vu notre cathédrale de pierre se reconstruire, nous pourrons aussi participer ensemble à la construction permanente de la cathédrale des frères et des sœurs, porteurs d’évangile en paroles et en actes.

Je pense que nous avons disposé quelques pierres pour cette cathédrale fraternelle lors de la grande assemblée des prêtres de Paris, à Lourdes en novembre dernier. Cette rencontre à laquelle j’avais invité les prêtres depuis des mois, je vous y avais pré- parés, chers diocésains, en vous disant que, pendant quatre jours, vous devriez vous passer des services quotidiens et habituels des prêtres ! Dans le prolongement de cette rencontre et aussi du rassemblement des séminaristes de France à Paris, début décembre, nous pouvons ainsi prier pour les vocations, pour toutes les vocations ; je recommande de dire cette prière à la fin des messes dominicales, à l’invitation du Service diocésain des Vocations :

Seigneur, nous croyons que Tu appelles tout homme
à aimer et à servir ses frères et sœurs.
Tu appelles les croyants à chercher
les chemins de l’amour que Tu nous offres.
Tu demandes aux Chrétiens d’annoncer l’Évangile
en suivant les pas de Jésus, en cherchant la sainteté.
Nous t’en prions :
Donne à Ton Église, au diocèse de Paris en particulier,
la joie de voir naître et grandir
de nouvelles vocations de prêtres
par amour pour Toi et pour tous ceux que Tu aimes.
Que les familles, les paroisses
et tous les groupes chrétiens
soient des lieux où s’épanouissent
toutes les vocations :
dans la vie laïque, dans le mariage ou dans le célibat,
dans la vie consacrée et la vie religieuse,
dans les ministères de prêtre et de diacre.
Que chacun éprouve la joie de se savoir aimé,
infiniment aimé de Toi,
au point de désirer mettre sa vie
au service de Ton amour.
Nous Te le demandons à Toi qui es Père,
Fils et Saint-Esprit. Amen !

Nous attendons les Jeux Olympiques (26 juillet – 11 août) et les Jeux Paralympiques (28 août – 8 septembre) qui se tiendront à Paris cet été. Mgr Philippe Marsset nous entraîne depuis des mois, pour que nous soyons prêts à bien accueillir dans notre ville ceux qui s’y trouveront pour cette occasion centennale – en effet, les Jeux n’étaient pas venus à Paris depuis 1924 ! Nous aurons là une belle occasion de vivre cette fraternité ouverte à laquelle nous appelle notre vocation chrétienne. Je ne peux faire mieux que de citer la présentation de nos propositions pastorales sous le titre de « Holy Games – Jeux saints » :

Le projet Holy Games s’inscrit dans la longue tradition de compagnonnage unissant l’Église, le monde du sport et l’univers olympique en particulier, en présence de nombreux représentants des institutions catholiques et sportives françaises. Avec 20 millions de visiteurs attendus, 15 000 athlètes et 45 000 volontaires sollicités, l’enjeu d’hospitalité est considérable. La mobilisation de l’Église catholique lors de ces JO s’articulera autour de deux points :
– célébrer avec enthousiasme, à travers le sport, l’éminente dignité de la personne humaine et l’appel à la fraternité entre les peuples.
– favoriser l’accès des plus vulnérables à ces JO, en particulier des personnes en situation de grande précarité, pour ne laisser personne au bord du chemin, afin d’honorer la devise olympique : « Plus vite, plus haut, plus fort – ensemble ».

En troisième lieu, du 22 au 24 septembre, nous aurons la Rencontre internationale pour la paix promue chaque année depuis 38 ans par la Communauté Sant’Egidio comme un pèlerinage de dialogue, d’amitié et de paix unissant les hauts représentants de toutes les religions du monde et de nombreuses personnalités du monde de la culture, de la société civile et de la politique. Je suis personnellement heureux d’accueillir cette rencontre à Paris ; il m’est souvent arrivé d’y participer et j’ai constaté qu’elle permet de développer un esprit et un désir de paix entre les peuples.

La solidarité avec les plus défavorisés (personnes âgées, sans-abri, enfants des rues, prisonniers, handicapés, condamnés à mort, malades du sida…), vécue comme service volontaire et gratuit, constitue une des caractéristiques principales de Sant’Egidio, communauté fondée en 1968 à Rome, par des étudiants qui voulaient se mettre au service des plus pauvres dans les quartiers de la ville. À Paris, différents services d’amitié et de soutien concret sont organisés avec l’implication de nombreux « Jeunes pour la paix » tournés vers les enfants en difficulté, les personnes âgées, les sans-abri ou les réfugiés.

Cette rencontre annuelle, qui se tient depuis 1987 dans des villes souvent symboliques de cette recherche [5], se déroulera sur trois jours : une assemblée d’ouverture au Palais des Congrès de Paris où prendront la parole des personnalités françaises et étrangères ; des forums thématiques dans divers lieux de pensée au centre de Paris où seront débattues les solutions et initiatives dans les domaines de la construction de la paix et de la réponse aux grandes crises contemporaines ; une cérémonie de clôture le 24 septembre sur le parvis de Notre-Dame à l’issue de temps de prière pour la paix organisés par chaque religion. Au cours de cette cérémonie sera renouvelé un appel fort à la paix dans le monde. Ces différents temps seront ouverts à la participation libre et gratuite de tous ceux qui le souhaitent, selon des modalités qui seront précisées en temps utile.

Dans cet esprit, et pour toutes ces raisons que je viens de présenter, nous avons à cœur de nous préparer, vaillamment mais humblement, à vivre cette belle année 2024. Elle est remplie d’espérance dès maintenant, et nous souhaitons la partager autour de nous et faire quelque bien dans notre société qui attend d’être apaisée et reconstituée pour envisager l’avenir.

En accueillant le don qui nous est fait de cette cathédrale restaurée, nous pourrions avoir la satisfaction de prendre soin de nous, de notre Église ; en réalité, notre foi nous entraîne à entrer dans le don du Christ qui prend soin de tous. L’année jubilaire de 2025 élargit notre regard et notre fraternité au monde que Dieu aime et ne se résout pas à voir souffrir et se déchirer. Les étapes que je vous propose de vivre nous feront, personnellement et ensemble, grandir dans cet amour de la Création que Dieu aime de façon inconditionnelle. À chacun de nous, en groupe de chrétiens, en paroisse ou en mouvement, de chercher comment nous associer à ce dynamisme spirituel qui nous entraîne.

Alors nous pouvons prier, en attendant le retour à Notre-Dame :

Avec Marie, l’Immaculée,
qui a accueilli toutes grâces,
nous nous préparons tout au long de cette année
à habiter de nouveau notre cathédrale,
maison de notre diocèse,
terme du chemin pour bien des pèlerins.
Avec le peuple de Paris qui,
depuis 860 ans, confie ses joies et ses peines
à Celle qui a porté le Sauveur,
disposons notre cœur afin que Notre Dame
soit toujours, dans notre cité,
Celle auprès de qui nous pouvons demeurer :
« Je n’ai rien à offrir et rien à demander.
Je viens seulement, Mère, pour vous regarder.
Vous regarder, pleurer de bonheur, savoir cela
que je suis votre fils et que vous êtes là. » (Paul Claudel)

Que le Seigneur, par l’intercession de la Vierge Marie, bénisse notre diocèse de Paris, chacun de vous, chers diocésains, et tous ceux qui attendent de revoir Notre-Dame !

Le 2 février 2024, en la fête de la Présentation du Seigneur,

Laurent Ulrich
Archevêque de Paris

[1Madeleine Delbrêl, Nous autres, gens des rues, Le Seuil, 1966, p. 99.

[2Concile Vatican II, Constitution sur La sainte liturgie, Sacrosanctum Concilium, § 41.

[3Psaume 113 B, 1.

[4Pape François, Lettre apostolique Desiderio desideravi, 29 juin 2022, § 15.

[5Par exemple à Assise en 2011 et 2016, à Sarajevo en 2012 ou à Berlin en 2023.