Thème de ce cycle de conférences de Carême : « Avec le Pape Benoît XVI à l’école des saints français »
Saint François de Sales selon le pape Benoît XVI
par Evelyne Duvaleix
François de Sales
Dieu nous a créés par amour et pour l’amour, Il nous a créés à l’image et à la ressemblance de Dieu ; ( Gn 1,27), François de Sales dont nous allons parler, s’appuie sur cette vérité biblique fondamentale pour le chrétien , dans sa vie
personnelle, dans sa vie pastorale et dans ses enseignements.
Et le lieu de la rencontre avec Dieu, c’est la fine pointe de l’âme, où , dit François :‘’ « Sitôt que l’homme pense un peu attentivement à la Divinité, il sent une certaine douce émotion du cœur, qui témoigne que Dieu est Dieu du cœur humain » (Traité de l’Amour de Dieu, I, XV)
Cette phrase tirée du ‘’Traité de l’Amour de Dieu’’, un des ouvrages majeurs de François de Sales, marque le début de la catéchèse de Benoît XVI le 2 mars 2011, sur François , car elle annonce toute sa spiritualité .
Et André Ravier , dans sa biographie de François commentera en disant :’’ car il semblait à François que toutes nos difficultés et problèmes avaient une seule et unique solution : apprendre aux hommes à aimer Dieu de tout leur cœur et le prochain comme soi-même pour l’amour de Dieu’’ .
Mais qui est cet homme qui a tant marqué ses proches et amis, son auditoire ami ou ennemi, les grands de ce monde comme les plus humbles, et finalement son époque ?
A quelle époque voit-il le jour ?
Cette année 1567 de sa naissance marque le début de la seconde guerre qui oppose catholiques et protestants en France et en Europe ; La 8ème et dernière guerre, dite de religion, s’achèvera en 1598
Le duché de Savoie où la famille de François possède plusieurs propriétés est proche de Genève , siège du diocèse catholique, et où pourtant Calvin , mort 3 ans plus tôt, a établi son fief.
Théodore de Bèze lui succédera . les relations avec cette ville de Genève et les calvinistes sont conflictuelles empreintes de violence et de destruction.
‘’ Ayant vécu à cheval entre deux siècles, le XVIe et le XVIIe, il rassemblait en lui le meilleur des enseignements du 16è siècle … qui s’achevait, réconciliant l’héritage de l’humanisme et la tension vers l’absolu propre aux courants mystiques’ , nous dit Benoît XVI
Quelle enfance a t-il ?:
Donc, François est né le 21 Août 1567 au château de Sales à Thorens,’’ dans une région frontalière de France, il était le fils du Seigneur de Boisy, antique et noble famille de Savoie ¨, précise Benoît XVI ;
François dira d’ailleurs : ‘’ ‘’ Je suis de toute façon savoyard , et de naissance et d’obligation’’
Il est le 1er enfant d’une fratrie de 13 , dont 8 survivront. Il naît 2 mois avant terme. Il est donc de santé fragile au tout début de sa vie.Il est baptisé dans l’église Saint-Maurice de Thorens le 28 Août 1567, jour de la fête de St Augustin , auquel il portera une très grande admiration.
Bien plus tard devenu évêque et prince de Genève, c’est dans cette même humble église que François sera sacré le 8 décembre 1602.
Pendant 6 ans, François reste le fils unique de ses parents.
Sa mère , très jeune, elle n’ a pas 20 ans, est douce et pieuse et elle veille tendrement sur son fils.
On rapporte que François rayonnait d’un irrésistible charme naturel, on dit de lui :
‘’ Je l’ai toujours connu comme un enfant grandement gracieux , beau de visage, affable, doux et familier…il était si sage et plein de bonnes paroles que tout le monde l’aimait’’.
Lui-même se décrira plus tard comme un grand affectif, mais subordonné à sa raison et à son amour pour Dieu. Ce caractère restera une constante du comportement de François, car partout où il passera : écoles, collèges, sociétés, puis cercles de relations , on le regrettera à son départ.
Or son père avait remarqué la vivacité de son intelligence, et voyait pour lui un avenir qui lui ouvrirait les plus hautes charges du duché de Savoie.
Il imposa donc une éducation qui affermit son caractère et son corps :
‘’ nourriture commune , aucune délicatesse au coucher’’, jeux de plein air avec ses cousins et les fils de ses amis du voisinage.
Il apprit à monter à cheval et à manier les armes de chasse, plus tard ce sera l’escrime.
Cette éducation lui servira dans les dangers auxquels il ne manquera pas d’être confronté.
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Sa formation :
Benoît XVI nous dit :’’ Sa formation fut très soignée ; il fit ses études supérieures à Paris, se consacrant également à la théologie….’’
Il est à noter que, dès l’âge de 8 ans en 1575 , François très pieux, est attiré par la vie d’Église et demande à son père l’autorisation de se faire tonsurer , qui est signe de renonciation au monde, signe visible également du passage à l’état clérical futur.
Son père qui a d’autres projets, laisse faire, pensant que ce n’est pas définitif.
Et lorsqu’il part pour Paris à 11 ans, où il restera 10 ans et où il étudiera d’abord au collège jésuite de Clermont tout nouvellement ouvert, (Louis le Grand actuel), François découvre les conséquences des guerres de religion sur la route. Les églises dévastées, pillées, brûlées marquent sa sensibilité religieuse.
La St Barthélémy ne date que de 6 ans et les combats entre catholiques et huguenots n’ont cessé d’accumuler les ruines.
L’enfant étonné regarde et son regard ira toujours s’approfondissant à mesure que les années passeront. Ce déchirement politique, social entre 2 courants religieux qui se réclament de l’Évangile sera pour lui un scandale insoutenable : le résoudre sera sa préoccupation jusqu’à la fin de sa vie.
A remarquer également, plus tard, à côté des ses études de rhétorique et de philosophie , il étudie à Paris, la théologie , mais sans que son père le sache, grâce au précepteur qui l’accompagne , Jean Déage, qui lui-même étudie cette discipline à la Sorbonne. François disait :
‘’ Je veux voir la sainte théologie, elle seule m’enseignera ce que Dieu désire montrer à mon âme’’
Il découvre là, un enseignement magistral sur le ‘’Cantique des Cantiques’’, par le dominicain Gilbert Génébrard, François reste marqué par son interprétation, comme symbole des relations de Dieu avec le cœur humain, et du Christ avec son Église.
Dès lors, il ne peut plus concevoir la vie spirituelle que comme une histoire d’amour entre Dieu et le cœur de l’homme.
Cela sera la clef de voûte de son approche pastorale et théologique ultérieure .
Mais il va connaître, à cette même époque , une crise fondatrice :
En effet, il découvre ,ce qui fait un énorme contraste, également à la Sorbonne, les thèses sur la Prédestination , inspirées mal à propos, de l’étude de Saint-Augustin, et de Saint Thomas d’Aquin. Un choix, serait pré établi par Dieu sur chacune des créatures, les unes pour le ciel, les autres pour la damnation.
Aucune voix chez ses professeurs ne vient apporter un écho contraire qui puisse le rassurer. François s’interroge sur son salut éternel et sur la prédestination de Dieu à son égard..
Ce qui est en jeu, ici, c’est l’amour de Dieu dont il a déjà fait l’expérience et dont il se pense à jamais privé. Lui qui ne peut envisager l’enfer pour les autres se croit lui-même voué à l’enfer.
Benoît XVI nous dit à ce sujet :.’’..vivant avec souffrance comme un véritable drame spirituel les questions théologiques de son époque. Il priait intensément, mais le doute le tourmenta si fort que pendant quelques semaines, il ne réussit presque plus à manger et à dormir. Au comble de l’épreuve, il se rendit dans l’église des dominicains à Paris, (St Etienne des Grès), qu’il fréquentait régulièrement,
Entré dans l’église, il va ‘’tout droit ‘’ à la chapelle de la Vierge noire. Il fait alors un acte d’abandon héroïque nous dit André Ravier dans sa biographie, à partir des éléments rapportés par Jeanne de Chantal.
Et Benoît XVI nous dit : Il ouvrit son cœur et pria ainsi :
« Quoi qu’il arrive, Seigneur, vous qui tenez tout dans votre main, et dont toutes les voies sont justice et vérité ; quoi que vous ayez arrêté à mon égard au sujet de cet éternel secret de prédestination et de réprobation ; vous dont les jugements sont un profond abîme, vous qui êtes toujours juste juge et Père miséricordieux, je vous aimerai, Seigneur, au moins en cette vie, s’il ne m’est pas donné de vous aimer dans la vie éternelle ; au moins je vous aimerai ici, ô mon Dieu, et j’espérerai en votre miséricorde, et toujours je répéterai toute votre louange, malgré tout ce que l’ange de Satan ne cesse de m’inspirer là-contre. Ô Seigneur Jésus, vous serez toujours mon espérance et mon salut dans la terre des vivants. Si, parce que je le mérite nécessairement, je dois être maudit parmi les maudits qui ne verront pas votre très doux visage, accordez-moi au moins de n’être pas de ceux qui maudiront votre saint nom » [Œuvres XXI, pp. 19-20]. 2
Alors François prend une tablette suspendue au balustre de la chapelle ; elle propose le texte du ‘’Souvenez-vous’’ de Bernard de Clairvaux . François le récite ‘’tout au long’’. La tentation s’évanouit : ‘’ En ce même instant, rapporte Mère de Chantal, il se trouva parfaitement et entièrement guéri;et il lui sembla que son mal était tombé sur ses pieds comme des écailles de lèpre’’
Benoît XVI ajoute : ‘’ François, âgé de vingt ans, trouva la paix dans la réalité radicale et libératrice de l’amour de Dieu : l’aimer, sans rien attendre en retour et placer sa confiance dans l’amour divin… . Ainsi, il trouva la paix….. , il s’abandonnait à sa bonté. Et cela sera le secret de sa vie, qui transparaîtra dans son œuvre principale : le Traité de l’amour de Dieu’’.
On peut remarquer la corrélation mystérieuse entre cette crise mystique et l’apostolat auquel va être appelé François, nous dit André Ravier dans sa biographie sur François.
La conciliation entre la grâce divine et la liberté humaine sera au cœur de ses grandes luttes :
le protestantisme, l’unité politico-religieuse de l’État, l’humanisme paganisant, les déviations de la direction spirituelle…
Pour affronter ces combats, il aura besoin d’un doctrine solide ; Cette doctrine ne sera pas seulement conçue par son esprit, mais sera le fruit de son expérience tragique.
En 1588, à 21 ans, en effet, François obtient sa licence et maîtrise à Paris, Paris qu’il va quitter, pour Padoue, pour y faire des études de droit ;
Il dira qu’il a fait du’’ droit civil’’ pour plaire à son père et ‘’du droit canonique’’ pour se plaire à lui-même’’. Benoît XVI nous dit à ce propos : ‘’et à l’Université de Padoue il fit des études de droit, suivant le désir de son père, qu’il conclut brillamment par une maîtrise in utroque iure, droit canonique et droit civil’’ .
Et sa vocation ?
A la fin de ses études de droit, plus que jamais, à 24 ans , il sent l’appel à ‘’être d’Église’’.
A son retour en Savoie, il échappe aux plans de mariage élaborés par son père et lui demande l’autorisation de devenir prêtre : ‘’ Mon père, qu’il vous plaise de me permettre d’être d’Église’’.
Car sa décision d’être d’Église datait de son jeune âge. N’avait-il pas demandé lui-même à être tonsuré ? Sa mère le soutient dans son projet, malgré la peine qu’elle a de le voir partir.
Le rêve de s’appuyer sur ce fils aîné, pour veiller sur la fratrie s’évanouit pour Mr De Boisy , qui lui répond généreusement, après avoir tenté de le convaincre toutefois :
‘’ Faites-donc, de par Dieu, ce que vous dites qu’il vous inspire !’’
‘’ Je vous donne, de sa part ma bénédiction’’
–François, prêtre, prévôt, puis Prince- évêque de Genève :
-En 1593, François devient prêtre, puis quelques années plus tard prévôt , c’est à dire le second personnage du diocèse après l’évêque, appelé à lui succéder en cas de disparition.
Il seconde Mgr De Granier à Annecy où l’évêché est en exil. Car Genève est devenu calviniste.
François se montre très vite prêtre de terrain, il prêche, il confesse beaucoup, il catéchise, il visite les malades les prisonniers . En 1598, il devient prévôt. Il refuse tout signe distinctif de sa fonction.
–En 1594, François se porte volontaire pour une mission qu’il conduira au péril de sa vie parfois, et qui durera jusqu’en 1598 afin de ramener au catholicisme le Chablais devenu Calviniste.
Il refusera la force et toute garde militaire. Il rédigera des méditations qu’il placardera dans les lieux publics, et il les glissera sous les portes des habitants.
Il procédera par le dialogue en exposant patiemment la doctrine catholique , gagnant les cœurs par l’exemple de sa conduite, toujours bonne et douce, mais ferme, et la puissance de la prière et de l’amour charité. Il réussira sa mission et rétablira le culte catholique en Chablais.
Cependant, le problème protestant restera une constante dans la vie de l’époque et dans celle de François, malgré l’apaisement relatif de l’Édit de Nantes. Il sera amené à toujours négocier , expliquer et rejoindre l’autre, dans la douceur et la fermeté des convictions de l’Évangile.
Le Carême du Louvre de 1602:
En 1602 A l’occasion d’une mission diplomatique à Paris, confiée par Mgr De Granier, François
va être appelé à prêcher au Louvre pendant le Carême. Et ce prêche sera un franc succès.
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Il va découvrir un autre monde et le renouveau spirituel alors bouillonnant à Paris ;
Il va faire de belles rencontres, Pierre de Bérulle, Michel de Marillac, Me Acarie qui ouvrira un Carmel réformé en France et puis , Vincent de Paul avec lequel il aura une grande amitié. (Vincent de Paul sera le directeur spirituel de l’ordre des Visitandines fondé par François, après son décès).
D’autant plus, que dans son auditoire, se glissaient là, par curiosité des protestants.
François a un grand talent d’orateur, tout en restant sobre, ferme, mais doux dans son approche.
Il y aura des conversions, et François en retirera la conviction que plus que les discussions savantes , la solution au conflit religieux passe par l’exposé de la vérité , tout inspiré d’amour.
Paris voulait le garder regrettera beaucoup son départ.
François devient Prince- évêque en 1602:
Sur le chemin du retour en Savoie, Il apprend le décès de Mgr De Granier, son évêque. Il est peiné.
Il est donc sacré évêque , et il devient Prince-évêque de Genève selon l’appellation du temps, le 8 Décembre 1602, dans l’église Saint-Maurice de Thorens, là où il avait été baptisé.
Il dira : ‘’ J’ai reçu la consécration épiscopale le jour de la Conception de la Vierge Marie entre les mains de laquelle j’ai remis mon sort.’’
Il se préparera longuement à cette consécration, par une retraite où il prend de fermes résolutions qu’il couche sur papier et fait signer à son directeur spirituel :
Il s’engage à vivre pauvrement, à jeûner, faire l’aumône , confesser, vivre au milieu de son peuple , et au centre de toute cette union à Dieu et d’amour du prochain, le ‘’très saint sacrifice de la messe’’, chaque jour sauf, empêchement d’extrême nécessité.
Il dira encore : ‘’ Quand je fus consacré évêque, Dieu m’ôta à moi-même pour me prendre à lui, puis, il me donna au peuple, c’est à dire qu’il m’avait converti de ce que j’étais pour moi, à ce que je fusse pour eux’’
Le pape Benoît XVI nous dit : ‘’Pasteur d’un diocèse pauvre et tourmenté, dans un paysage de montagne dont il connaissait aussi bien la dureté que la beauté, il écrivit :
« [Dieu] je l’ai rencontré dans toute sa douceur et sa délicatesse dans nos plus hautes et rudes montagnes, où de nombreuses âmes simples l’aimaient et l’adoraient en toute vérité et sincérité ….’’ (Lettre à la Mère de Chantal, octobre 1606, dans Œuvres, éd. Mackey, t. XIII, p. 223)
Pendant 20 ans, François de Sales donnera à son diocèse, ses jours ses nuits, ses travaux et ses veilles, sa santé finalement soumise à rude épreuve.
S’il s’absente, c’est pour rendre quelque service au pape, ou à ‘’Son Altesse’’, le duc de Savoie, inquiet de l’estime que lui témoigne Paris et le roi de France et qui ne lésine pas sur le nombre de ses demandes de mission.
François ne veut pas de carrosse, se déplace à cheval. Il fait de nombreuses visites pastorales.
Il prie, lit , et lorsque son devoir l’appelle à des occupations extérieures, il dira qu’il ‘’quitte Dieu pour Dieu ‘’ qu’il retrouve dans l’amour du prochain. Il écrit de multiples lettres d’amitié et de direction spirituelle.
Benoit XVI nous le décrit : ‘’C’est un apôtre, un prédicateur, un homme d’action et de prière ; participant à la controverse et au dialogue avec les protestants, faisant toujours plus l’expérience, au-delà de la confrontation théologique nécessaire, de l’importance de la relation personnelle et de la charité ;
Benoit XVI nous dit encore qu’il est ‘’engagé dans la réalisation des idéaux du Concile de Trente’’ .
En effet, François s’attache à la réforme de son diocèse, attentif à l’authenticité des vocations, à la formation des prêtres et des laïcs , confessant, conseillant sans relâche, guidant le discernement. Il dira à ses prêtres : ‘’ … La charge des pasteurs, n’est pas des âmes fortes , mais des faibles…’’
-Au Carême 1604 , Dijon où les affaires de son diocèse le conduisent, François rencontre Me De Chantal . Veuve de 32 ans, elle a 4 enfants. Elle se remet difficilement, car le couple était très uni. Elle est très pieuse. Ils ‘’se reconnaissent’’ immédiatement ; Chacun d’eux avait ‘’vu l’autre ‘’en songe ou par quelque prémonition. ( A noter: Me de Chantal sera la grand-mère de Me de Sévigné)
François fondera avec Me de Chantal, l’ordre des Visitandines, entre 1610 et 1615 à Annecy.
Benoît XVI nous dit que cet ordre religieux est ‘’caractérisé – comme le voulut le saint – par une consécration totale à Dieu, vécue dans la simplicité et l’humilité, en accomplissant extraordinairement bien les choses ordinaires ‘’.13 maisons sont ouvertes au décès de François
Cet ordre est ouvert même aux personnes de mauvaise condition physique , pourvu que , ajoute Benoît XVI, citant François : « … Je veux que mes Filles – écrit-il – n’aient pas d’autre idéal que celui de glorifier [Notre Seigneur] par leur humilité » (Lettre à Mgr de Marquemond, juin 1615).
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– Comment approcher la spiritualité de François ?
Les contacts que prenait François avec son peuple, au confessionnal, dans ses entretiens particuliers, au cours de ses activités pastorales, dans ses activités quotidiennes avivaient sans cesse
son désir de fournir un’’guide de la vie spirituelle’’ aux âmes désireuses de tendre à la perfection évangélique.
Alors par sa prédication, sa correspondance et ses deux grands ouvrages : l’ ‘’Introduction à la vie dévote’’ et le ‘’Traité de l’Amour de Dieu ‘’, il cherche à faire apparaître un christianisme authentique , une foi vivante , une charité efficace où la joie est présente.
–En fait, François a une vision apostolique du monde :
Pour lui, L’Évangile s’adresse à tous , la perfection évangélique est accessible à tous, quelles que soient les origines professionnelles ou sociales.
La sainteté n’est pas le résultat automatique de la grâce, ni le simple résultat d’efforts humains, elle est la combinaison des deux :Le don gratuit de Dieu et le travail de l’homme, dans la liberté.
C’est une aventure dans laquelle , Dieu et l’homme sont liés.
L’appel est universel, seules les réponses sont différentes, car chaque personne est unique.
Il propose un chemin avec 2 principales déclinaisons :
-1) Dans le monde, où Philothée, destinataire imaginaire , reçoit les recommandations de conduites vertueuses à développer, pour vivre la vraie charité, l’amour de Dieu, ce qu’il appellera,
la dévotion. Son ouvrage, ‘L’Introduction à la vie dévote’’ est issu d’un petit livret que François avait d’abord rédigé pour Me de Charmoisy , dont il assurait la direction spirituelle .
Cela vise la vie quotidienne. la 1ère parution date de 1608. François en connaîtra 40 .
Benoît XVI commente en décrivant : ‘ ‘l’harmonie entre action dans le monde et prière, entre condition séculière et recherche de perfection, avec l’aide de la grâce de Dieu qui imprègne l’homme et, sans le détruire, le purifie, en l’élevant aux hauteurs divines’’.
-2) Et puis, Pour les chrétiens déjà bien engagés dans les exigences de leur baptême, des chrétiens plus mâtures, François s’adresse à un autre personnage imaginaire : Théotime , dans le ‘’Traité de l’Amour de Dieu’’
Cet écrit’’ est un guide pour les plus hauts contemplatifs, mais aussi un bréviaire pour les hommes d’action’’. C’est aussi un écrit souvent poétique, nous commente André Ravier dans sa biographie de François. La 1ère parution date de 1616. Elle est en partie issue des liens avec les Visitandines.
Benoît XVI nous commente : Cette ‘’ description de l’itinéraire vers Dieu …. part de la reconnaissance de l’« inclination naturelle » ( livre I, chap. XVI), inscrite dans le cœur de l’homme bien qu’il soit pécheur, à aimer Dieu par dessus toute chose…..Son Dieu est père et seigneur, époux et ami, il a des caractéristiques maternelles et de nourrice, il est le soleil ,dont même la nuit est une mystérieuse révélation. Un tel Dieu attire l’homme à lui avec les liens de l’amour, c’est-à-dire de la vraie liberté » (TAD ., livre I, chap.VI ).
– François utilise une méthode :
Il faut partir de l’intérieur de l’homme, de son cœur , siège de ses décisions, lieu de la rencontre
avec Dieu, et de la conversion.
Un cœur gouverné par la raison, habité par la mémoire de l’Écriture, des grâces reçues, de l’expérience.
Il faut avoir un cœur de disciple , en unissant son cœur à sa vie, en appliquant au quotidien
les trouvailles spirituelles, la méditation de la Parole et en utilisant les grâces reçues.
Dans une marche vers Dieu à la portée de tous, avec un esprit de liberté.
Le tout pour porter témoignage , dans la fidélité, avec un amour humble et toujours grandissant.
-Dans sa correspondance de direction et d’amitié spirituelle, François a un style différent de celui de ses ouvrages . C’est un extraordinaire directeur d’âmes.
Il personnalise et s’adapte à chaque interlocuteur.
Mais il conseille toujours de vivre le moment présent, de ne pas désirer autre chose que ce qui nous est donné à vivre, de tout faire par amour pour Dieu et d’accomplir ce que l’Évangile commande. Il dit :‘’Fleuris là où tu es planté’’
C’est avec cœur que François de Sales souhaite que nous accueillions cette volonté de Dieu sur nous.
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Dans l’intimité de sa correspondance, il appuie sa spiritualité sur le cœur.
Notre relation à Dieu doit être un incessant cœur à cœur. Et aussi entre nous. Mais le cœur , au
sens salésien, est l’endroit le plus intime et personnel , le plus inaliénable et divin en nous.
C’ est en ce centre mystérieux que chacun rencontre Dieu , acquiesce à ses appels ou les refuse.
Il termine souvent ses lettres en disant : ‘’Faites que notre Sauveur soit le cœur de votre cœur’’
François, on s’en doute, aura une vie brève, mais tellement intense. Il meurt, à 55ans épuisé après une dernière mission confiée par le duc de Savoie, qui n’avait cure de la santé de son fidèle évêque, déjà bien malade à ce moment là.
François aura une influence énorme, et elle tiendra précisément à ce que chacun se voit respecté dans sa situation particulière et regardé avec bienveillance, abordé avec douceur.
Sa volonté de transmettre lui aura fait rédiger de multiples manuels, traités, catéchismes, lettres d’amitié spirituelle, et ouvrages pour témoigner inlassablement de l’amour de Dieu qui le faisait vivre et dont il irradiait tant autour de lui, selon les témoins de son temps
Il aura été un pasteur, un conseiller, un ami , un théologien et un fin diplomate.
François de Sales a été béatifié 1661 par le pape Innocent X, puis canonisé en 1665 par le pape Alexandre VII. Il est fait docteur de l’Église en 1877 par le pape Pie IX qui mettra l’accent sur l’élargissement de l’appel à la sainteté . Le Concile Vatican II aura la même posture.
BENOÎT XVI nous dit enfin :’’Ce n’est pas par hasard qu’à l’origine de nombreux parcours de la pédagogie et de la spiritualité de notre époque nous retrouvons la trace de ce maître, sans lequel n’auraient pas existé saint Jean Bosco ni l’héroïque « petite voie » de sainte Thérèse de Lisieux.
Nous laissons Benoît XVI conclure :
‘’De la figure de ce saint émane une impression de rare plénitude, démontrée dans la sérénité de sa recherche intellectuelle, mais également dans la richesse de ses sentiments,
dans la « douceur » de ses enseignements qui ont eu une grande influence sur la conscience chrétienne.’’
‘’…de l’humanité, il a incarné les diverses acceptions que, aujourd’hui comme hier, ce terme peut prendre : culture et courtoisie, liberté et tendresse, noblesse et solidarité. Il avait dans son aspect quelque chose de la majesté du paysage dans lequel il avait vécu, conservant également sa simplicité et son naturel. Les paroles et les images avec lesquelles il s’exprimait résonnent de manière inattendue, également à l’oreille de l’homme d’aujourd’hui, comme une langue natale et familière’’
Les mots de la toute fin reviennent à François de sales :
Je prendrai une citation de ses 2 grands ouvrages, et une citation d’une lettre d’amitié spirituelle:
‘’ Vous dormiez et Dieu veillait sur vous, et pensait sur votre cœur des pensées de paix, il méditait pour vous des méditations d’amour’’ ( ‘’Introduction à la vie dévote’’ 5,2)
‘’ La grâce est si gracieuse, et saisit si gracieusement pour…..attirer, qu’elle ne gâte rien en la liberté de notre volonté ;…. la grâce a des forces, non pour forcer , mais pour allécher le cœur, elle a une sainte violence, non pour violer , mais pour rendre amoureuse notre liberté ;
( ‘’Traité de l’amour de Dieu’’ 2, 12)
‘’ IL FAUT TOUT FAIRE PAR AMOUR ET NON PAR FORCE ‘’ lettre du 14 Octobre 1604 à Jeanne de Chantal. ( écrit volontairement en lettres capitales par François de Sales )
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