Que devons-nous faire ?

« Seule l’attente est génératrice de joie authentique. C’est le cas précisément de la joie chrétienne de Noël. Elle consiste à se réjouir de ce qui commence, de ce qui bourgeonne. »

Lectures :

III Dimanche de l’Avent – Lc 3, 10-18

Les spécialistes dans la communication nous informent que notre vie en dit beaucoup plus que les mots que nous employons. En fait, seul un très faible pourcentage (environ 7%) de notre communication dépend des mots que nous utilisons. Le reste est rendu, souvent inconsciemment, par nos gestes et par le ton, les accents et les silences. C’est pourquoi nous pouvons parfois être surpris que, malgré ce que nous disons; malgré des phrases bien construites et réfléchies, nous faisons passer un message complètement différent de nos intentions. Il peut alors être utile de se demander de temps en temps ce que dit aux autres ma vie…?

Oui, notre manière de vivre nous révèle inévitablement, et l’évangile de ce dimanche semble nous dire que c’est la vie, et n’est que la vie (ma vie) – est un lieu théologique, c’est-à-dire un espace à travers lequel Dieu se manifeste ou non! Voilà pourquoi ceux qui viennent auprès de Jean le Baptiste pour le questionner ne l’interroge pas sur ce qu’ils doivent dire, mais bel et bien sur ce qu’ils doivent faire.

Que devons-nous faire ? Aucune situation n’est sans espoir – répond Jean le Baptiste. Même dans la vie de ceux qui sont chargés des armes (les soldats) et de l’argent sale (les publicains) il est possible de trouver Dieu.

Remarquez que malgré son radicalisme, Jean le Baptiste ne les exclut pas de la possibilité de changer, il ne leur ordonne pas de raser leur vie, mais les invite à la transformer. Car parfois, il est impossible de changer notre situation, mais nous pouvons toujours transformer la façon dont nous la vivons en prenant soin de notre humanité malade: malade de l’égoïsme; malade de l’envie; malade de l’hypocrisie; malade de la méchanceté ou malade des « péchés de la langue » qui sont très nombreux: bavardage, commérage, médisance, calomnie, duplicité, mauvaise foi, faux témoignage, flatterie, ambiguïté, parjure… Tout cela blesse le langage, les liens humains et – comme dans le cas de Mgr Aupetit – les personnes qui en sont victimes.

Que devons-nous donc faire ? Commençons à prendre soin des parties malades de nos vies, c’est-à-dire de tout ce qui nous empêche d’être des personnes authentiques et honnêtes.

Et encore une petite chose.

Comme je le disais au début de cette eucharistie, le III dimanche de l’Avent est entièrement imprégné du thème de la joie. Mais qu’est-ce que cela implique pour la fête de Noël ? Eh bien, la fête de Noël est un test très fort. On peut la vivre dans une joie artificielle, facile, qui est une joie de l’oubli. Pendant 48 heures, on vit une parenthèse enchantée avec ceux que l’on aime, en oubliant la pandémie, les turbulences au sein de notre diocèse, le drame des abus sexuels sur les mineurs, etc. Ou au contraire, on reçoit une joie qui passe à travers l’épreuve: une joie qui n’oublie pas les difficultés de l’existence, mais qui accueille la venue du Christ toute simple et pauvre. C’est bien cette joie qui nous donne la force de poursuivre la route jusque dans l’épreuve.

Dans le poème « Le samedi du village », Giacomo Leopardi (1798-1837), un grand poète et philosophe italien, exprime un concept selon lequel, dans la vie présente, la seule joie possible et authentique est la joie de l’attente, la joie du samedi. Le samedi – c’est le jour rempli de joie précisément parce qu’il est rempli d’espérance. En effet, l’attente de la fête est plus belle que la fête elle-même, car souvent la possession d’un bien ne fait qu’engendrer la désillusion et l’ennui. Seule l’attente est génératrice de joie authentique. C’est le cas précisément de la joie chrétienne de Noël. Elle consiste à se réjouir de ce qui commence, de ce qui bourgeonne. Ce n’est pas faire preuve de naïveté, en oubliant ce qui va mal, mais c’est devenir capable de reconnaître ce qui est en train de naître dans ce monde; dans cette Eglise; dans cette paroisse; dans ma famille; dans ma vie. Giacomo Leopardi dirait: « C’est la joie du samedi, qui prélude au Dimanche sans fin: la vie éternelle. Amen.

Père Stanislas

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