Le Sacrifice d’Abraham

Fête de l’Aid El Adha (fête du sacrifice)

Cette fête musulmane qui a lieu le 15 octobre 2013, est une des fêtes les plus importantes du calendrier musulman (appelée aussi l’Aid El Kebir, la grande fête), en l’honneur du sacrifice demandé par Dieu à Abraham.

Dans la bible, Genèse 22, il est dit :

« Après ces choses, Dieu mit Abraham à l’épreuve, et lui dit: Abraham! Et il répondit: Me voici!  Dieu dit: Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes, Isaac; va-t’en au pays de Morija, et là offre-le en holocauste sur l’une des montagnes que je te dirai. (…)

Alors Isaac, parlant à Abraham, son père, dit: Mon père! Et il répondit: Me voici, mon fils! Isaac reprit: Voici le feu et le bois; mais où est l’agneau pour l’holocauste? Abraham répondit: Mon fils, Dieu se pourvoira lui-même de l’agneau pour l’holocauste. Et ils marchèrent tous deux ensemble. (…)

Puis Abraham étendit la main, et prit le couteau, pour égorger son fils. Alors l’ange de l’Éternel l’appela des cieux, et dit: Abraham! Abraham! Et il répondit: Me voici! L’ange dit: N’avance pas ta main sur l’enfant, et ne lui fais rien; car je sais maintenant que tu crains Dieu, et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique. Abraham leva les yeux, et vit derrière lui un bélier retenu dans un buisson par les cornes; et Abraham alla prendre le bélier, et l’offrit en holocauste à la place de son fils. (…)

L’ange de l’Éternel appela une seconde fois Abraham des cieux, et dit: Je le jure par moi-même, parole de l’Éternel! Parce que tu as fais cela, et que tu n’as pas refusé ton fils, ton unique, je te bénirai et je multiplierai ta postérité, comme les étoiles du ciel et comme le sable qui est sur le bord de la mer; et ta postérité possédera la porte de ses ennemis.

Toutes les nations de la terre seront bénies en ta postérité, parce que tu as obéi à ma voix. »

Dans le Coran, Sourate 37 – Sourate des Rangs (As-Sâffât), il est mentionné que c’est le fils d’Abraham qui demande à son père d’obéir à Dieu.

« [99] Abraham dit alors : «Je m’en vais vers mon Seigneur ; Il me guidera dans Sa Voie.»

[100] «Seigneur, supplia-t-il, veuille m’accorder une vertueuse postérité !» [101] Nous lui annonçâmes alors que son foyer serait égayé par la naissance d’un garçon plein de sagesse. [102] Et lorsque l’enfant fut en âge d’accompagner son père, celui-ci lui dit : «Mon cher fils ! J’ai vu en songe que je t’immolais. Vois ce qu’il y a lieu de faire !» – «Père, dit l’enfant, fais ce qui t’est ordonné. Tu verras, s’il plaît à Dieu, que je suis de ceux qui savent s’armer de patience dans l’épreuve.»

[103] Tous les deux s’étaient résignés à la Volonté divine. Et déjà le père avait couché le front de son fils contre terre, [104] lorsque Nous l’appelâmes : «Ô Abraham ! [105] Tu as ajouté foi à ta vision ! C’est ainsi que Nous récompensons ceux qui font le bien.» [106] En vérité, ce fut là une bien rude épreuve . [107] Nous rachetâmes l’enfant par une offrande de grande valeur. [108] Et Nous perpétuâmes son renom dans les générations ultérieures. [109] Paix sur Abraham ! [110] C’est ainsi que Nous récompensons les gens de bien ; »

Le rapprochement des phrases « Je te bénirai et je multiplierai ta postérité » et « Nous perpétuâmes son renom dans les générations ultérieures », nous fait comprendre en quoi nous sommes tous fils d’Abraham, notre père à tous dans la foi.

Dès lors, les souffrances liées au non dialogue entre les religions sont d’autant plus douloureuses.

Permettez-moi de rappeler ce qu’écrivait en Inde l’Empereur Asoka (304-232 av JC) dans son édit de tolérance :

« On ne devrait pas honorer seulement sa propre religion et condamner les religions des autres, mais on devrait honorer les religions des autres pour cette raison-ci ou cette raison-là. En agissant ainsi on aide à grandir sa propre religion et on rend aussi service à celles des autres. En agissant autrement, on creuse la tombe de sa propre religion et on fait ainsi du mal aux religions des autres.

Quiconque honore sa propre religion et condamne les religions des autres, le fait bien entendu par dévotion à sa propre religion, en pensant « je glorifierai ma propre religion ». Mais, au contraire, en agissant ainsi, il nuit gravement à sa propre religion.

Ainsi la concorde est bonne : que tous écoutent et veuillent bien écouter les doctrines des autres religions. »

Cet édit de tolérance trouve des échos aujourd’hui dans le dialogue interreligieux.

Ainsi, dans son message pour la fin du Ramadan, le 10 juillet 2013,  le Pape François écrivait :

« Je suis conscient que les dimensions de la famille et de la société sont particulièrement importantes pour les musulmans pendant cette période, et il vaut la peine de noter qu’il y a des parallèles avec la foi et la pratique chrétiennes dans chacun de ces domaines. (…)

Pour en venir maintenant au respect mutuel dans les relations interreligieuses, notamment entre chrétiens et musulmans, ce que nous sommes appelés à respecter c’est la religion de l’autre, ses enseignements, ses symboles et ses valeurs. C’est pour cela que l’on réservera un respect particulier aux chefs religieux et aux lieux de culte. Quelles-sont douloureuses ces attaques perpétrées contre l’un ou l’autre de ceux-ci!

Il est clair que, quand nous montrons du respect pour la religion de l’autre ou lorsque nous lui offrons nos vœux à l’occasion d’une fête religieuse, nous cherchons simplement à partager sa joie sans qu’il s’agisse pour autant de faire référence au contenu de ses convictions religieuses. »

Dans l’encyclique du Pape François du 29 juin 2013, un passage sur la foi d’Abraham, notre père dans la foi, nous dit :

«Abraham, notre père dans la foi

8. La foi nous ouvre le chemin et accompagne nos pas dans l’histoire. C’est pourquoi, si nous voulons comprendre ce qu’est la foi, nous devons raconter son parcours, la route des hommes croyants, dont témoigne en premier lieu l’Ancien Testament. Une place particulière revient à Abraham, notre père dans la foi. Dans sa vie se produit un fait bouleversant : Dieu lui adresse la Parole, il se révèle comme un Dieu qui parle et qui l’appelle par son nom. La foi est liée à l’écoute. Abraham ne voit pas Dieu, mais il entend sa voix. De cette façon la foi prend un caractère personnel. Dieu se trouve être ainsi non le Dieu d’un lieu, et pas même le Dieu lié à un temps sacré spécifique, mais le Dieu d’une personne, précisément le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob, capable d’entrer en contact avec l’homme et d’établir une alliance avec lui. La foi est la réponse à une Parole qui interpelle personnellement, à un Toi qui nous appelle par notre nom.

9. Cette Parole dite à Abraham est un appel et une promesse. Elle est avant tout appel à sortir de sa propre terre, invitation à s’ouvrir à une vie nouvelle, commencement d’un exode qui le conduit vers un avenir insoupçonné. La vision que la foi donnera à Abraham sera toujours jointe à ce pas en avant à accomplir. La foi « voit » dans la mesure où Abraham marche, où il entre dans l’espace ouvert par la Parole de Dieu. Cette parole contient en outre une promesse : ta descendance sera nombreuse, tu seras le père d’un grand peuple (cf. Gn 13, 16 ; 15, 5 ; 22, 17). Il est vrai qu’en tant que réponse à une Parole qui précède, la foi d’Abraham sera toujours un acte de mémoire. Toutefois cette mémoire ne fixe pas dans le passé mais, étant mémoire d’une promesse, elle devient capable d’ouvrir vers l’avenir, d’éclairer les pas au long de la route. On voit ainsi comment la foi, en tant que mémoire de l’avenir, memoria futuri, est étroitement liée à l’espérance.

10. Il est demandé à Abraham de faire confiance à cette Parole. La foi comprend que la Parole — une réalité apparemment éphémère et passagère quand elle est prononcée par le Dieu fidèle — devient ce qui peut exister de plus sûr et de plus inébranlable, ce qui rend possible la continuité de notre chemin dans le temps. La foi accueille cette Parole comme un roc sûr, des fondations solides sur lesquelles on peut édifier. C’est pourquoi dans la Bible la foi est désignée par la parole hébraïque ‘emûnah, dérivée du verbe ‘amàn, qui dans sa racine signifie « soutenir ». Le terme ‘emûnah peut signifier soit la fidélité de Dieu, soit la foi de l’homme. L’homme fidèle reçoit la force de se confier entre les mains du Dieu fidèle. En jouant sur les deux significations du mot — que nous trouvons aussi dans les termes correspondants en grec (pistós) et latin (fidelis) —, saint Cyrille de Jérusalem exaltera la dignité du chrétien, qui reçoit le nom même de Dieu : les deux sont appelés « fidèles »[8]. Saint Augustin l’expliquera ainsi : « L’homme est fidèle quand il croit aux promesses que Dieu lui fait ; Dieu est fidèle quand il donne à l’homme ce qu’il lui a promis »[9].

11. Un dernier aspect de l’histoire d’Abraham est important pour comprendre sa foi. La Parole de Dieu, même si elle apporte avec elle nouveauté et surprise, ne se trouve en rien étrangère à l’expérience du Patriarche. Dans la voix qui s’adresse à lui, Abraham reconnaît un appel profond, inscrit depuis toujours au coeur de son être. Dieu associe sa promesse à ce « lieu » où l’existence de l’homme se montre depuis toujours prometteuse : la paternité, la génération d’une vie nouvelle – « Ta femme Sara te donnera un fils, tu l’appelleras Isaac » (Gn 17, 19). Ce Dieu qui demande à Abraham de lui faire totalement confiance se révèle comme la source dont provient toute vie. De cette façon, la foi se rattache à la Paternité de Dieu de laquelle jaillit la création : le Dieu qui appelle Abraham est le Dieu créateur, celui qui « appelle le néant à l’existence » (Rm 4, 17), celui qui « nous a élus en lui, dès avant la fondation du monde … déterminant d’avance que nous serions pour Lui des fils adoptifs » (Ep 1, 4-5). Pour Abraham la foi en Dieu éclaire les racines les plus profondes de son être, lui permet de reconnaître la source de bonté qui est à l’origine de toutes choses, et de confirmer que sa vie ne procède pas du néant ou du hasard, mais d’un appel et d’un amour personnels. Le Dieu mystérieux qui l’a appelé n’est pas un Dieu étranger, mais celui qui est l’origine de tout, et qui soutient tout. La grande épreuve de la foi d’Abraham, le sacrifice de son fils Isaac, montrera jusqu’à quel point cet amour originaire est capable de garantir la vie même au-delà de la mort. La Parole qui a été capable de susciter un fils dans son corps « comme mort » et « dans le sein mort » de la stérile Sara (cf. Rm 4, 19), sera aussi capable de garantir la promesse d’un avenir au-delà de toute menace ou danger (cf. He 11, 19 ; Rm 4, 21). »

A la paroisse Saint-Jacques Saint-Christophe, Cieux (Comité International pour une Ethique Universelle Contre la Xénophobie) réunit les chrétiens, les Juifs et les Musulmans, ainsi que les laïcs, pour un dialogue interreligieux au sein du quartier.

Et nous souhaitons une bonne fête de l’Aid El Kebir/Aid El Adha à nos frères mulsulmans.

Sources :

http://www.info-bible.org/lsg/01.Genese.html

http://www.hisnulmuslim.com/coran/index.php?num_sourate=37

http://www.vatican.va/holy_father/francesco/messages/pont-messages/2013/documents/papa-francesco_20130710_musulmani-ramadan_fr.html

http://pema.free.fr/aso01.php3

https://www.sjsc.fr/2013-05-une-eglise-ouverte-au-monde/

http://www.vatican.va/holy_father/francesco/encyclicals/documents/papa-francesco_20130629_enciclica-lumen-fidei_fr.html