Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous

25ème dimanche – temps ordinaire

Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous  et le serviteur de tous

Lectures du jour : 

Dimanche dernier, nous avons entendu la réaction de Pierre à la première annonce par Jésus de sa passion elle exprimait la distance des amis de Jésus entre ce que le Christ essayait de leur dire et ce qu’ils étaient capables de comprendre et d’accepter à ce moment-là compte tenu de leur conception qu’ils avaient d’un Messie triomphant. On pourrait dire qu’Ils n’étaient pas sur la même longueur d’ondes que Lui.

Aujourd’hui, Jésus annonce à nouveau qu’il va être livré, mis à mort et qu’il ressuscitera, et nous voyons les disciples de Jésus demeurer dans l’incompréhension mais sur un autre sujet : celui du Messie-Serviteur.

Tout en poursuivant leur chemin avec Jésus, les disciples discutent entre eux pour savoir qui serait le plus grand parmi eux. Nous pouvons évidemment trouver cela un peu étonnant : ils viennent d’entendre l’annonce de la mort et de la Résurrection du Christ. et ils se mettent à discuter, entre eux, pour savoir qui deviendra le chef. Ces hommes n’étaient pas des monstres. S’ils s’inquiétaient de savoir qui serait le plus grand, ce n’était, sans doute, pas d’abord pour remplacer Jésus mais parce qu’il fallait bien qu’il y ait un chef au milieu de cette troupe. ils comprennent qu’il fallait bien envisager la suite de la mission de Jésus et ils se demandent qui est le plus proche de ses projets ? Qui sera le plus capable de prendre sa succession ?  Si Jésus disparait, qui sera le premier ?

Jésus s’efforce de répondre à leurs questions et de les éclairer en situant bien les choses à leur place, constatant une fois de plus l’écart entre ce qu’il a dit et ce qu’ils ont compris, Jésus est obligé de leur expliquer à nouveau la différence entre le chemin qu’il suit, la mission, qui est la sienne et qu’il accomplit d’être le Serviteur et leur rêve d’un Messie triomphant. Jésus demande à ses disciples d’exercer l’autorité selon son esprit : dans l’humilité et le service. Le critère pour être le premier, c’est d’être dans l’attitude de serviteur : « Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous ». Le serviteur, c’est celui qui est le plus petit, et donc pas celui qui est le plus grand. Le serviteur, c’est celui qui se met au service des autres. Si donc quelqu’un veut être le plus grand parmi vous, il faut qu’il prenne la dernière place, s’il veut être le chef il faut qu’il se fasse le serviteur. Et comme si la parole ne suffisait pas à faire comprendre ce qu’il dit, Jésus prend un enfant et le place au milieu d’eux en signe de ce qu’il faut devenir : redevenir comme un enfant. Mais plus encore, cet enfant qu’il donne comme l’exemple de la faiblesse, de la dépendance, il le présente comme celui à qui il s’identifie : « Celui qui accueille un enfant m’accueille moi ; et celui qui m’accueille accueille celui qui m’a envoyé, Dieu le Père ». En quelques phrases et en un geste, Jésus explique à ses disciples à quel point l’amour de Dieu pour l’humanité conduit le Père Tout-Puissant, à prendre pour lui, sur lui, en lui, dans la personne du Fils, la condition de serviteur et du serviteur de dernier rang. Rappelons-nous ce passage de la lettre aux Philippiens de saint Paul, « Lui qui était de condition divine il ne retint jalousement le rang qu’il l’égalait à Dieu, mais il se fit obéissant, obéissant jusqu’à la mort sur la croix ». Le salut apporté par Dieu c’est la victoire sur le péché qui remet le pécheur debout, c’est l’offrande que Jésus fait de lui-même, de sa vie, de sa personne, par amour pour l’humanité.

On cherche bien souvent à expliquer ou à comprendre qu’elle est l’originalité du christianisme parmi tant d’autres religions : qu’apportons-nous de spécifique ? Que disons-nous de nouveau ? Quelle espérance portons-nous aux hommes ? Eh bien, le message spécifique que le Christ essaye de faire comprendre à ses disciples, c’est que la puissance de Dieu se manifeste dans la faiblesse de son serviteur, c’est que la toute-puissance de la Miséricorde se donne jusqu’à accepter de prendre sur elle le péché et ses conséquences, c’est que le Fils Unique de Dieu se fait serviteur souffrant pour l’humanité, c’est que Jésus de Nazareth prend sur lui, dans son humanité, dans toute sa personne, le malheur des hommes et l’assume. La religion catholique n’est pas une solution meilleure que les autres aux problèmes de l’humanité, c’est la religion de l’amour accompli et servi jusqu’à l’extrême : « Ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’au bout » Ce que nous apportons de spécifique dans le concert des nations et dans l’image que les hommes se font de la victoire sur le mal, c’est que, pour nous, la victoire passe par l’offrande de nous-mêmes. Nous n’espérons pas vaincre le mal par un surcroît de puissance, nous espérons vaincre la haine par un surcroît d’amour. Nous n’espérons pas apporter la paix en écrasant ceux qui sont belliqueux, nous espérons apporter la paix en étant nous-mêmes des artisans de la justice et en acceptant de supporter sur nous-mêmes et pour nous-mêmes ce qui divise et ce qui amène le malheur à l’humanité. Nous ne sommes pas des prêcheurs triomphants, voulant imposer nos convictions, nous sommes des serviteurs.                                                                                          Nous comprenons bien en entendant ces paroles de Jésus, combien les disciples pouvaient avoir de mal à entrer dans cette perspective développée par le Christ. Nous comprenons surtout combien nous-mêmes, nous pouvons avoir de mal à entrer dans cette vie de foi en acceptant et en désirant tout recevoir de Dieu et non pas en réalisant notre salut par nos propres forces. Notre prière de chrétiens n’est pas de demander à posséder le monde, c’est de demander que Dieu possède le monde. Quand nous disons le Notre Père, nous ne demandons pas à Dieu qu’il nous fasse vaincre l’humanité, nous demandons à Dieu : que son règne vienne.

Puisse le Seigneur mettre en nos cœurs son Esprit de vérité et d’amour pour que, suivant le chemin de l’Évangile, nous soyons conduits peu à peu à reconnaître la véritable nature du Messie, la véritable victoire du Christ, victoire de l’amour sur la haine, victoire du service sur la domination, victoire de la pauvreté sur toute forme de richesse.

Et que Dieu nous donne de trouver notre joie en nous faisant, à sa suite, les serviteurs les uns des autres.

Père Francis Corbière

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Homélie :

https://youtu.be/porT-Z9wQTw

Laudate Dominum: